Les 15 principes qui feront du métavers une réalité

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Nous voici donc arrivés dans l’ère des métavers… Fantasmés par la science-fiction depuis des décennies, prototypés avec un certain succès au début des années 2000, ces mondes virtuels semblent désormais prêts pour une infinité d’usages. Mais quels sont ces usages ? Quelles sont les vraies différences avec les métavers tels que Second Life ou Minecraft ? Et surtout, pourquoi maintenant, avec tous ces métiers et toutes ces offres d’emplois qui débarquent ?

Il y a quelques années, vers 2017, plusieurs acteurs du monde économique considéraient les technologies de réalité virtuelle et augmentée comme la quatrième vague technologique, faisant suite respectivement au PC, à Internet et au mobile. Chacune de ces trois innovations majeures a complètement révolutionné les usages du quotidien, et il semblerait que les technologies de réalité virtuelle et augmentée soient sur le point d’en faire de même. Nous n’allons plus nous contenter d’être devant nos écrans, mais nous allons nous impliquer dans nos écrans.

En prenant un peu de recul sur le rapport des humains à l’information et aux usages sociaux, on peut comprendre qu’il s’agit bien d’une suite logique. Autrefois, bien avant le métavers, les peintures rupestres préhistoriques accompagnées de contes oraux étaient les premiers médias à captiver l’attention des tribus. Déjà à l’époque, l’imaginaire collectif était mis à contribution pour créer des mondes mythologiques et fantastiques, servant à expliquer ce qu’ils vivaient, ou à rêver ce qu’ils voudraient vivre. Ces récits étaient autant de leçons transmises de génération en génération. Les usages ont ensuite évolué, mais sont demeurés des procédures sociales opérant dans le même état d’esprit : transcender la réalité pour façonner l’identité collective.

Qu’est ce que le métavers ?

Il semblerait que l’auteur américain de science-fiction Neil Stephenson soit le père du concept de métavers (Ondrejka, 2004). Dans son roman Snow Crash publié en 1992 (Stephenson, 1992), Stephenson décrit un futur dystopique où les citoyens passent leur temps dans des univers virtuels, afin d’échapper au quotidien d’un monde hyper-capitaliste gouverné par quelques méga-entreprises. Si le web 3.0 tient ses promesses avec la décentralisation par défaut, le futur de Hiro Protagonist devrait être différent à bien des égards.

L’univers de Stephenson ressemble étrangement à celui dépeint par Steven Spielberg dans son film de 2018 Ready Player One. Le film est a priori tiré du roman éponyme écrit en 2011 par Ernest Cline (Cline, 2011), mais on peut se demander si Cline s’est lui-même inspiré de Stephenson. Pour les puristes, il est possible de dire que Stephenson a bien inventé le terme, mais sans y associer le bon concept. Le métavers, tel qu’il peut être imaginé pour l’avenir, tient plus du cyberespace décrit par William Gibson en 1984, dans son ouvrage Neuromancien. En plus d’être l’ouvrage fondateur du mouvement cyberpunk, il s’agit également du premier ouvrage à décrire les contours d’un métavers décentralisé, avant même l’apparition des premiers casques de réalité virtuelle d’Autodesk à la fin des années 1980.

On trouve plus de 50 définitions formelles du concept de métavers dans la littérature académique (Park & Kim, 2022). Les points communs systématiques concernent l’environnement de réalité virtuelle, la participation des utilisateurs sous forme d’avatars, et des interactions humaines développées. Outre ces points communs, il est possible de trouver des caractéristiques bien plus nombreuses, suivant les auteurs. L’objectif de cet article est de dresser la liste des principes constitutifs d’un vrai métavers, tout en montrant leur état actuel d’avancement. Mais avant de plonger dans la complexité, il peut être utile de simplifier ainsi la définition de métavers :

Un métavers est un environnement immersif crédible, dans lequel les utilisateurs peuvent interagir entre eux via leurs avatars respectifs de manière sécurisée. Ils peuvent également créer, utiliser, détenir et monétiser des éléments du réseau.

Le métavers peut être vu comme un réseau interconnecté et en ligne d’environnements immersifs sociaux dans des plates-formes multi-utilisateurs persistantes et permanentes, parmi d’autres propriétés (Davis, Murphy, Owens, Khazanchi, Zigurs, 2009 ; Mystakidis, 2022). Avec le métavers, s’ouvre l’univers de la post-réalité, où la réalité physique fusionne avec la réalité numérique, pour créer un ensemble perpétuel et persistant. Le métavers, dans son acception moderne du terme, est la convergence de très nombreuses technologies permettant des interactions dynamiques, sécurisées et multisensorielles avec des environnements virtuels, des individus incarnés par des avatars, et objets numériques. Les premières itérations de métavers permettaient une représentation simple des individus, dans un environnement en basse définition.

L’écosystème existant des constructeurs de métavers

Les itérations en cours proposent des plates-formes de réalité virtuelle immersives et sociales, compatibles avec les jeux vidéo en ligne massivement multijoueurs, les mondes de jeu ouverts et les espaces collaboratifs en réalité augmentée (Dionisio, III, Gilbert, 2013). Surtout, et c’est ce qui fait la différence, l’ensemble est progressivement connecté à l’économie réelle, grâce aux passerelles et sécurités permises par la blockchain. Pour reprendre les éléments posés par Rosenblum et Cross (1997), les prochaines itérations des métavers devraient donc se concentrer particulièrement sur la qualité de l’immersion multisensorielle, de l’interaction, et de la fidélité visuelle.

Mais les métavers sont bien plus que les expériences qu’ils proposent. Le blogueur américain Jon Radof, spécialisé sur la compréhension des métavers, propose de découper la chaîne de valeur du métavers en sept segments : les expériences, les portails d’accès, les créateurs d’économies, les créateurs d’environnements, les acteurs de la décentralisation, les équipementiers, et les fournisseurs d’infrastructures physiques. Fin 2021, Jon Radof recensait déjà plus d’une centaine d’acteurs participant à l’émergence des métavers modernes.

Les acteurs par segment qui rendent possibles les métavers (Source : Jon Radof, 2021).

15 verrous à lever pour permettre le métavers

Comme le montre Jon Radof, il existe d’ores et déjà plusieurs métavers, ou plutôt des proto-métavers. Les principaux s’appellent Decentraland, Sandbox ou encore Roblox. On peut également citer Mesh de Microsoft, Minecraft, ou même Second Life. Seulement voilà, ces métavers n’en sont pas vraiment, dans la mesure où il leur manque certaines propriétés, et pas toujours les mêmes. La réalité est que construire un métavers digne de ce nom prend du temps. Meta a annoncé la construction de son métavers fin 2021, pour un fonctionnement optimal prévu d’ici 2025. Baidu, Epic Games, la ville de Séoul, et d’autres acteurs majeurs ont également annoncé la création de leurs propres métavers. La guerre des métavers s’annonce, c’est certain. Mais seuls ceux qui ont toutes les cartes en main pourront prétendre au titre.

En reprenant les différents éléments constitutifs de la définition d’un métavers, ce sont en tout 15 principes au moins qui composent les caractéristiques nécessaires à son bon fonctionnement :

  1. Scalabilité : Un utilisateur doit pouvoir naviguer dans l’environnement sans aucune latence, connecté avec des millions d’autres utilisateurs. L’état actuel des technologies ne permet pas une scalabilité totale, face aux volumes de données.
  2. Immersion : Un utilisateur doit se sentir téléporté dans un nouvel environnement, notamment grâce à une perception multisensorielle adaptée. L’état des technologies, notamment haptiques, nécessite encore du développement.
  3. Interaction : Un utilisateur doit pouvoir interagir avec son environnement et avec d’autres individus, comme dans le monde réel. Cela implique de pouvoir créer et partager des contenus notamment. Les technologies sont prêtes.
  4. Fidélité visuelle : Un utilisateur doit pouvoir s’immerger dans une qualité visuelle telle que son cerveau perçoit un environnement réel. L’état des technologies permet ce principe, même s’il reste du travail pour gérer la latence de la connexion.
  5. Permanence : Un utilisateur doit ressentir la cohérence des événements. Si un mur est détruit, alors il est détruit, et doit être reconstruit pour exister à nouveau. La blockchain permet notamment d’assurer la permanence en traçant toute donnée.
  6. Persistance : Un utilisateur doit pouvoir naviguer dans un monde qui ne cesse jamais d’exister, et qui peut évoluer en permanence. Le monde du jeu vidéo a rendu possible l’existence d’environnements hautement persistants.
  7. Ouverture : Un utilisateur doit pouvoir naviguer librement dans un environnement étendu. Les technologies pour ce principe ont largement été éprouvées dans les jeux vidéos, au point de faire de ce principe une évidence par défaut.
  8. Interopérabilité : Un utilisateur doit pouvoir naviguer vers et depuis un métavers librement, notamment via la portabilité de ses données et objets numériques. L’interopérabilité est possible, mais dépendra de la volonté des concepteurs.
  9. Économie : Un utilisateur doit pouvoir tirer des revenus, au même titre que les autres acteurs du réseau, en fonction de sa contribution. Bien évidemment, les technologies sont prêtes et mises à profit pour ce sujet majeur de financement.
  10. Transparence : Un utilisateur doit pouvoir avoir accès aux informations de tout objet ou individu présent, tout en respectant l’anonymat de chacun. La blockchain permet une traçabilité et une publication libre qui assure la transparence totale.
  11. Décentralisation : Un utilisateur doit pouvoir posséder le réseau dans lequel il crée de la valeur, pour décider des modifications et capter la valeur créée. Les technologies sont prêtes, même si la société l’est un peu moins.
  12. Incarnation : Un utilisateur doit pouvoir créer et développer son identité dans le métavers, via un ou plusieurs avatars qu’il possède et dont il a le contrôle exclusif. Les technologies sont prêtes.
  13. Confiance : Un utilisateur doit pouvoir évoluer sans crainte de malveillances d’autres parties prenantes ou du système lui-même. Si la blockchain permet une transparence, elle ne contrôle pas les intentions, et le sujet reste un challenge.
  14. Sécurité : Un utilisateur doit pouvoir évoluer en parfaite sécurité physique, matérielle et psychologique, et doit pouvoir se prémunir du hacking, de la violence et de tout autre problème. La technologie seule n’est ici pas suffisante, il faut des règles.
  15. Acceptabilité : Un utilisateur doit pouvoir évoluer dans les métavers avec d’autres utilisateurs, dans le respect des bonnes pratiques sociales, environnementales, morales et éthiques sur lesquelles reposent notre société. Un voeu pieu ?

Les technologies qui rendent le métavers possible

Chaque itération des métavers se construit selon les technologies disponibles. D’abord les technologies primaires (sensoriel réel, radio, télévision), puis l’ordinateur, le web, le mobile, la réalité virtuelle et augmentée, les équipements haptiques, et enfin, la blockchain, l’Internet des objets (IoT) et l’intelligence artificielle (IA). Chacune de ces technologies est le résultat d’avancées majeures extrêmement complexes en sciences et techniques (Nevelsteen, 2018). Grâce aux technologies rendues disponibles, il est donc possible d’envisager des métavers intimement liés à notre perception de la réalité. D’un point de vue plus sociologique, le métavers actuel est basé sur la valeur sociale de la génération Z selon laquelle le moi en ligne et le moi hors ligne ne sont pas différents (Park & Kim, 2022).

Les usages potentiels sont pratiquement infinis, mais il est déjà possible de citer ceux déjà identifiés ou supposés (Papagiannidis, Bourlakis & Li, 2008 ; Romero, Viana & Angel, 2016 ; Jun, 2020 ; Gökçe Narin, 2021 ; Heo & Kim, 2021). Ce sont ainsi plus d’une douzaine de grandes familles d’usages qui sont déjà l’objet de cas concrets ou d’articles académiques : jeu vidéo, commerce, productivité, finance, création artistique, réseau social, tourisme, rencontres, sport, éducation, coaching, domotique, religion…

Conclusion

Lorsque l’on entend dire que le métavers en pleine construction, ce n’est pas une manière de parler, tant il reste des technologies à perfectionner pour permettre un métavers convaincant et fiable. Au-delà des technologies, il sera nécessaire d’établir des règles et principes éthiques pour assurer une sécurité matérielle, physique et psychologique des utilisateurs et de leurs biens.

Etat des métavers en avril 2022 en comparaison de la structure cible des métavers.

Les informés du web 3 remarqueront la pyramide utilisée pour illustrer l’état du métavers. En effet, la principale promesse du web 3 est la décentralisation. Pourtant, quand on creuse un peu l’état du marché, notamment au niveau des services coeur qui rendent le web 3 possible, on remarque que quelques entreprises contrôlent l’intégralité du marché, ou comment donner l’illusion de la décentralisation en gardant bien le contrôle ! Si vous êtes curieux de mieux comprendre, je ne peux que vous conseiller de faire des recherches sur les entreprises Alechemy et Infura par exemple…

Pour conclure sur le métavers, les technologies sont relativement neutres par défaut, et ce sont les adaptations en principes et en règles qui détermineront le caractère vertueux des différents usages proposés. Pour comprendre la portée réelle de ces métavers, il reste encore à comprendre le fonctionnement des technologies du virtuel et du web, ainsi que les premiers cas d’usages démontrés et à venir dans les métavers. Je vous prépare actuellement un ouvrage complet sur le sujet, à venir très prochainement ! Stay tuned…

Bibliographie

Cline, E. (2011). Ready Player One, Random House Publishers.

Davis, A., Murphy, J. D., Owens, D., Khazanchi, D., Zigurs, I. (2009). Avatars, people, and virtual worlds: Foundations for research in metaverses. Journal of the Association for Information Systems, 10(2), 90.

Dionisio, J. D. N., III, W. G. B., & Gilbert, R. (2013). 3D virtual worlds and the metaverse: Current status and future possibilities. ACM Computing Surveys (CSUR), 45(3), 1–38.

Gökçe Narin, N. (2021). A Content Analysis of the Metaverse Articles, Journal of Metaverse, 1(1), 17–24.

Heo, M. H., & Kim, D. (2021). Effect of Augmented Reality Affordance on Motor Performance: In the Sport Climbing. Human-Centric Computing And Information Sciences, 11.

Jun, G. (2020). Virtual reality church as a new mission frontier in the metaverse: Exploring theological controversies and missional potential of virtual reality church. Transformation, 37(4), 297–305.

Mystakidis, S. (2022). Metaverse. Encyclopedia 2022, 2, pp. 486–497.

Nevelsteen, K. J. (2018). Virtual world, defined from a technological perspective and applied to video games, mixed reality, and the Metaverse. Computer Animation and Virtual Worlds, 29(1), e1752.

Ondrejka, C. (2004). Escaping the gilded cage: User created content and building the metaverse. NYL Sch. L. Rev., 49, 81.

Papagiannidis, S., Bourlakis, M., Li, F. (2008). Making real money in virtual worlds: MMORPGs and emerging business opportunities, challenges and ethical implications in Metaverses, Technological Forecasting and Social Change, 75(5), 610–622.

Park, S. M., Kim, Y. G. (2022). A Metaverse: Taxonomy, Components, Applications, and Open Challenges, IEEE Access, 10, pp. 4209–4251.

Romero, GP., Viana, M., Angel, M. (2016). New artistic behaviors in “Second Life”. Tercio Creciente, 9, 33–50.

Rosenblum, L., Cross, R. (1997). Challenges in Virtual Reality. In Visualization and Modeling; Academic Press: Cambridge, MA, USA; pp. 325–339.

Stephenson, N. (1992). Snow Crash, Penguin Books Australia.

Blog de Jon Radof : https://jradoff.medium.com (consulté le 3 mars 2022).

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